Quand on referme « Le consentement » de Vanessa Springora, on est quand même un peu sonné. Sonné par les manipulations perverses de cet homme. Sonné par le courage qu’il a fallu à cette femme pour vaincre son déni et sa culpabilité et finalement écrire. Sonné enfin qu’une époque qui se libérait violemment sans avoir le temps de construire de nouveaux repères, un milieu littéraire très marquis de sade – nous apprenons en passant que le cynisme de Cioran n’avait pas de limites-, une mère qui a poussé sa fille dans la gueule du loup, aient pu amener cette jeune fille aussi près du gouffre.
Le livre contient aussi ce qui a tenu. Les rares paroles publiques (comme celle de Denise Bombardier à Apostrophe), les quelques adultes sans arrière pensée, l’indignation éphémère mais saine du petit copain, la solidarité avec une autre victime, et enfin et surtout le secours intime de l’analyste.
C’est aussi une profonde réflexion sur la difficulté à définir le consentement. « Comment admettre qu’on a été abusé, quand on ne peut nier avoir été consentant ? » si elle constitue la question clé pour V, est aussi la question clé de tout faux consentement. Bien au delà du consentement d‘ordre sexuel. Nous pouvons contempler cette question du haut de ces trois dernières années, les années metoo, mais nous ne trouvons pas encore la réponse à cette immense et complexe question. Ce livre y contribue néanmoins.